Ferrari a bâti sa légende sur des créations d’exception qui font aujourd’hui rêver les collectionneurs du monde entier. Mais parfois, le Cheval cabré nous réserve des surprises plus inattendues. C’est le cas de ce prototype pour le moins disgracieux qui s’apprête à faire sensation lors de la prochaine vente aux enchères de RM Sotheby’s, organisée en parallèle du prestigieux concours d’élégance de Pebble Beach.
Au premier regard, difficile de croire que cette étrange création italienne puisse atteindre une estimation comprise entre 900 000 et 1,2 million de dollars. Pourtant, derrière son apparence peu flatteuse se cache une histoire fascinante qui pourrait bien séduire les amateurs les plus avertis.
Cette Ferrari ne sert à rien et ne ressemble à rien. Pourtant elle pourrait dépasser le million d’euros !
Une vente aux enchères d’exception
La vente RM Sotheby’s de Monterey aura lieu les 15 et 16 août 2025 au Monterey Conference Center en Californie, et s’annonce particulièrement riche en Ferrari d’exception. Les collectionneurs pourront notamment porter leur regard sur une F40 LM by Michelotto, estimée entre 8,5 et 9,5 millions de dollars, ou encore sur une F50 dans sa rare teinte jaune et une LaFerrari Aperta noire, toutes deux évaluées à plus de 6 millions de dollars.
Mais c’est bien ce prototype unique qui risque de voler la vedette, non pas pour sa beauté, mais pour son rôle crucial dans l’histoire de la marque.
Une 458 Italia défigurée ?
À première vue, cette Ferrari pourrait faire penser à une 458 Italia qui aurait subi les foudres d’un préparateur peu inspiré. Les lignes reconnaissables de la dernière berlinette V8 atmosphérique à moteur central arrière de Ferrari sont encore identifiables, mais elles ont été largement altérées par de nombreuses excroissances.
La face avant se distingue par un imposant masque qui rallonge considérablement le porte-à-faux, orné d’un grillage rectangulaire et de trois fentes anguleuses à la base du pare-brise. Le profil gauche révèle une petite trappe d’accès à la mécanique avec des rivets apparents, tandis que les jantes ont perdu leurs centres. Quant à l’arrière, il frappe par son capot moteur remanié, surmonté d’une énorme entrée d’air proéminente, et par des sorties d’échappement démesurément allongées pour permettre le branchement des appareils de mesure des émissions.
Seul l’habitacle demeure fidèle à celui d’une 458 de série, si ce n’est quelques indices révélateurs comme un autocollant en forme d’éclair sur le volant, qui trahit la vocation particulière de cette italienne hors norme.
Le secret du « Prototype M4 »
En réalité, cette Ferrari n’est pas une simple 458 Italia customisée, mais ce que l’industrie automobile appelle un « mulet » – un prototype de développement utilisé lorsque la carrosserie définitive d’un nouveau modèle n’est pas encore finalisée.
Baptisé « Prototype M4 » ou « F150 Muletto M4 » en interne, ce véhicule a joué un rôle capital dans la genèse de la Ferrari LaFerrari. Son châssis a été entièrement modifié pour accueillir le premier V12 hybride de l’histoire de la marque, qui équiperait plus tard la première hypercar électrifiée du constructeur de Maranello.
Les prototypes Ferrari sont le fruit de l’expérience, du dévouement, de l’émotion et du triomphe, comme le souligne le constructeur lui-même. Ce mulet particulier a été utilisé de mai 2011 à décembre 2012, effectuant d’innombrables kilomètres d’essais sur le circuit de Fiorano et les routes environnantes, sous l’œil attentif des photographes-espions.
Un destin exceptionnel
Contrairement à la plupart des prototypes qui finissent généralement à la casse une fois leur mission accomplie, ce mulet de développement a connu un sort bien différent. Ferrari réserve parfois certains de ses prototypes les plus significatifs à des clients privilégiés, sous réserve qu’ils acceptent les contraintes d’usage : aucune utilisation sur route publique ni sur circuit ouvert au public, faute d’homologation.
Cette interdiction d’usage n’a pas découragé un collectionneur d’acquérir cette pièce unique de l’histoire Ferrari. Et aujourd’hui, près de treize ans après ses premiers tours de roue, elle s’apprête à changer de mains lors de la vente RM Sotheby’s du 15 août 2025.
Une estimation qui fait débat
Avec une estimation comprise entre 900 000 dollars et 1,2 million de dollars (soit entre 773 000 et 1,03 million d’euros), ce prototype soulève de nombreuses interrogations. Son apparence peu avantageuse et ses restrictions d’utilisation pourraient rebuter certains acheteurs potentiels.
Pour donner une perspective, cette même somme permettrait d’acquérir lors de la même vente une Mercedes 300 SL Roadster de 1960, une McLaren Senna, une Bentley R-Type Continental Fastback Sports Saloon Mulliner de 1953, une Porsche 911 GT3 RS 4.0 ou une Nissan Skyline GT-R Nismo 400R – toutes parfaitement utilisables et bien plus séduisantes esthétiquement.
Cependant, ce prototype possède un atout majeur : son importance historique dans le développement de la LaFerrari. Les prototypes Ferrari disposent généralement du moteur et du système hybride de pré-production finale et sont utilisés par les ingénieurs pour finaliser le développement des modèles de série.
Pour les collectionneurs les plus passionnés, posséder un véhicule qui a directement contribué à la naissance d’une hypercar légendaire comme la LaFerrari représente une opportunité unique. Cette dimension historique pourrait bien compenser les défauts esthétiques et les limitations d’usage.
Un marché en pleine évolution
Le marché des Ferrari rares et des prototypes connaît actuellement une dynamique particulière. Une Ferrari F40 LM aux couleurs Pilot a récemment été vendue pour 4 842 500 euros, établissant un record pour ce modèle, prouvant que les collectionneurs sont prêts à investir des sommes considérables pour des pièces d’exception.
Dans ce contexte, ce prototype LaFerrari pourrait bien surprendre par son prix de vente final. Sa rareté absolue – il est unique au monde – et son rôle dans l’histoire récente de Ferrari en font un objet de collection d’un genre nouveau.
✅ À retenir : Ce prototype Ferrari disgracieux incarne parfaitement la passion des collectionneurs pour l’histoire automobile. Bien qu’inutilisable sur route et peu séduisant esthétiquement, il représente un jalon crucial dans le développement de la LaFerrari, première hypercar hybride de la marque.
Son estimation entre 900 000 et 1,2 million de dollars témoigne de l’importance accordée aux véhicules historiques uniques, même imparfaits. La vente du 15 août 2025 chez RM Sotheby’s révélera si les collectionneurs valorisent davantage l’histoire que l’apparence.
